Le témoignage de Dominique BERTINOTTI, ministre déléguée auprès de la ministre des Affaires sociales et de la Santé, chargée de la Famille, a mis en lumière le fait que « traitements contre le cancer » et « permanence au travail » était possible, même à un très haut niveau de responsabilité. Mais dans la « vraie vie », cette équation est-elle si simple ?
Le cancer, le travail des personnes malades et la vie « normale »
Le cancer et ses traitements atteignent différents niveaux de la vie des patients : leur santé, en premier lieu, leur force physique, mais aussi leur psychisme et la dimension matérielle de la vie quotidienne. Cumuler traitements contre le cancer et travail semblent a priori possible. Mais face au cancer et à ses multiples répercussions, il est plutôt étonnant de pouvoir dire que la vie peut continuer « comme si de rien n’était ». Du simple point de vue des faits, de l’organisation du quotidien, c’est forcément faux. Alors est-il possible de simplement « faire avec » pour continuer ?
L’emploi du temps d’une personne suivant des traitements contre le cancer est-il compatible avec le travail ?
Les traitements contre le cancer sont multiples : chimiothérapie, radiothérapie, curiethérapie, opérations, hormonothérapie, etc. Seul ou cumulés, leur rythme est très différent en fonction des protocoles de soins et des modes d’administration.
Pourtant, le cas le plus fréquemment rencontré est la multiplicité des rendez-vous médicaux pour les traitements ou leur suivi (cf. les fiches pratiques de mon livre Mieux vivre le cancer : La Bible à ce sujet). Entre les prises de sang, les cures de chimiothérapie, les séances de radiothérapie, les scanners, les pet-scans, les scintigraphies, … le patient courre alors qu’il n’a déjà pas beaucoup d’énergie.
Rajouter du temps de travail à cet emploi du temps, c’est toujours possible, mais ambitieux.
L’état d’une personne suivant des traitements contre le cancer est-il compatible avec le travail ?
A ces traitements et cet emploi du temps chargé, s’ajoute l’état du patient. Parler « d’état », ce n’est pas très joli, pas très beau à entendre, ni à écrire mais assez révélateur d’un certain degré d’atteinte physique et moral. Le cancer et les traitements sont éprouvants. Et c’est un euphémisme.
En théorie, travailler dans cet « état » cela veut dire le dépasser ; passer outre la maladie et ce qu’elle entraine. Ce dépassement est sans doute vrai pour un certain nombre de patients pour lesquels le travail les extirpe de leur condition non voulue de malade. Le travail, c’est garder un pied dans la vie et ne pas se laisser ensevelir par la maladie.
Bien.
Mais ce qui est vrai pour certains ne l’est pas pour tous.
Le témoignage de Mme Dominique BERTINOTTI : un acte de courage ou un contre-exemple ?
Les réactions au témoignage de Dominique BERTINOTTI ont été nombreuses et en grande partie très élogieuses, notamment dans la classe politique. Le mot qui revient le plus souvent est « courage ».
Madame Dominique BERTINOTTI explique sa prise de parole dans Le Monde daté du 22/11/2013 pour
« aider à faire évoluer le regard sur cette maladie dont le nom est tellement anxiogène ».
C’est un objectif louable. Par contre prendre la précaution de rajouter :
« pour que les employeurs comprennent que la mise en congé longue maladie n’est pas forcément la meilleure des solutions »
… c’est maladroit… voire … scandaleux.
D’une part, ce n’est pas l’employeur qui « décide de mettre en longue maladie », c’est le médecin. Ce qui n’a rien à voir. Et cette maladresse prononcée par une ministre déléguée auprès de la ministre de la Santé, c’est embêtant… mais on peut l’attribuer à la fatigue de la chimiothérapie et autres soins. Comme chacun sait, les traitements contre le cancer sont très éprouvants même pour une ministre.
D’autre part, faire de « son cas personnel » un exemple est totalement abusif. Que des personnes suivant un traitement contre le cancer souhaitent travailler, c’est leur droit. Que ces personnes se considèrent comme étant toujours performantes, malgré la maladie et les traitements, c’est légitime. Mais faire de ce ressenti personnel une généralité est dangereux. Ce sont des extrapolations qui mettent l’ensemble des personnes suivant un traitement contre le cancer et en arrêt de travail dans une position délicate.
Et ils ont déjà assez de choses à gérer comme cela.
Crédits photos de l’article sur arrêt de travail et cancer : © Ali Ender Birer – Fotolia.com
Cancer des deux seins 2010, récidive 2012..
Ablation des deux..
Restructuration..
J’ai bossé avec traitement lourd, point de suture..
Mon métier, ouvrière paysagiste.. Quand on a pendant 5 à 6h la débroussailleuse où le souffleur qui pèse extrêmement lourd sur la poitrine, croyez moi cela relève de l’exploit.! Marcher pendant des km avec les engins,finalement se péter les points de suture, continuer à bosser ainsi, car vraiment pas le choix,il ne faut pas compter sur un arrêt maladie, payé peu et en bribe.
Aide extérieure? Faut pleurer, et expliquer continuellement du pk et comment.
Bref,2018 3ème récidive aggravée..
Ben,vu ma situation, attends protocole,la suite pas le choix, retour au boulot, pour continuer à vivre à peu près décemment!!!
Super non !!!!
Tout à fait d’accord avec la dernière personne, chaque cas est particuliers et tout le monde ne peut pas être traité de la même façon sur le plan maladie et professionnel
je suis traitée pour un cancer du sein inflammatoire depuis octobre 2015
j’ai continué à travailler chez moi d’octobre à mai pendant la chimio
je suis avocat et ai pu aménager mon temps de travail
c’est une chance mais mon travail m’a aussi aidé à surmonter la maladie car j’avais à penser à autre chose
l’aménagement du temps de travail à domicile quand il est possible est une bonne solution
tout simplement scandaleux !!! atteinte d un cancer massif et invasif, je suis sans forces après chaque chimio et n’en déplaise a madame la ministre, je ne peux même pas assurer les gestes simple d une vie courante…. alors me parler d’aller travailler est du domaine du comique !!!
Madame Bertinotti aurait dû être en intellectuellement capable de comprendre que chaque patient en fonction de son type de cancer, de son âge, de son mental des types de traitements et de plein d’autres facteurs encore, réagit à sa façon à la maladie. A ce titre, personne n’est en mesure de montrer l’exemple ni de dicter la « bonne conduite du cancéreux ». Elle aurait mieux fait de réfléchir à la portée nuisible de ses propos avant de les exprimer surtout en temps que ministre déléguée auprès du ministre de la santé.